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Alors, peut-être, alors mon humble sépulture
Se cachera sous les rameaux
Où souvent, quand mes pas erraient à l’aventure,
Mes vers inachevés ont mêlé leur murmure
Au bruit de la rame et des eaux.

Mais si le Temps m’épargne et si la Mort m’oublie,
Mes mains, mes froides mains par de nouveaux concerts
Sauront la rajeunir, cette lyre vieillie ;
Dans mon cœur épuisé je trouverai des vers,
Des sons dans ma voix affaiblie ;
Et cette liberté, que je chantai toujours,
Redemandant un hymne à ma veine glacée,
Aura ma dernière pensée
Comme elle eut mes premiers amours.



VI

Adieux à Rome


 
L’airain avait sonné l’hymne pieux du soir.
Sur les temples de Rome, où cessait la prière,
La lune répandait sa paisible lumière :
Au Forum à pas lents, triste, j’allai m’asseoir.
J’admirais ses débris, ses longs portiques sombres,
Et dans ce jour douteux, par leur masse arrêté,
Tous ces grands monuments empruntaient de leurs ombres
Plus de grandeur encore et plus de majesté :
Comme l’objet absent, qu’un regret nous rappelle,
Reçoit du souvenir une beauté nouvelle,
Mon luth, longtemps muet, préluda dans mes mains,
Et sur l’air grave et doux dont le chant se marie