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Sont l’emblème flottant de ses peuples unis.

L’héroïque leçon qu’il offre aux opprimés
Sous les feux du Midi produit l’indépendance :
D’autres républicains, contre l’Espagne armés,
En nommant Bolivar chantent leur délivrance.
Tel un jeune palmier, pour féconder ses sœurs,
Fleurit et livre aux vents ses parfums voyageurs :
Tel ce naissant empire ; et l’exemple qu’il donne
Répand autour de lui comme un parfum sacré,
Qui vers les bords voisins s’exhale et les couronne
Des immortelles fleurs dont lui-même est paré.
« O Liberté, dit-il, sors de ce doux sommeil
« Qu’à l’ombre de mes lois tu goûtes sur ces rives,
« Et que pour s’affranchir l’Europe à ton réveil
« Secoue, en m’appelant, ses mains longtemps captives !
« D’un regard de tes yeux réchauffe ces cœurs froids,
« Engourdis sous un joug dont ils aiment le poids.
« De tout pouvoir injuste éternelle ennemie,
« Va donc, fille du ciel, va par de là les mers,
« Va, toi qu’ils croyaient morte, et qui n’est qu’endormie,
« Briser les fers rouilles de-leur vieil univers ! »

Colomb se ranimait à cette noble voix.
Terre ! s’écria-t-on, terre ! terre !… il s’éveille ;
Il court : oui, la voilà, c’est elle, tu la vois.
La terre. … ô doux spectacle ! ô transports ! ô merveille !
O généreux sanglots qu’il ne peut retenir !
Que dira Ferdinand, l’Europe, l’avenir ?
Il la donne à son roi, cette terre féconde ;
Son roi va le payer des maux qu’il a soufferts :
Des trésors, des honneurs en échange d’un monde,
Un trône, ah ! c’était peu !… que reçut-il ? des fers.