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Ah ! Qu’une page si funeste
De ce règne victorieux,
Pour n’en pas obscurcir le reste,
S’efface sous les pleurs qui tombent de nos yeux !
Qu’un monument s’élève aux lieux de ta naissance,
Ô toi, qui des vainqueurs renversas les projets !
La France y portera son deuil et ses regrets,
Sa tardive reconnaissance ;
Elle y viendra gémir sous de jeunes cyprès :
Puissent croître avec eux ta gloire et sa puissance !

Que sur l’airain funèbre ou grave des combats,
Des étendards anglais fuyant devant tes pas,
Dieu vengeant par tes mains la plus juste des causes.
Venez, jeunes beautés ; venez, braves soldats ;
Semez sur son tombeau les lauriers et les roses !
Qu’un jour le voyageur, en parcourant ces bois,
Cueille un rameau sacré, l’y dépose, et s’écrie :
« À celle qui sauva le trône et la patrie,
Et n’obtint qu’un tombeau pour prix de ses exploits. »

Notre armée au cercueil eut mon premier hommage ;
Mon luth chante aujourd’hui les vertus d’un autre âge :
Ai-je trop présumé de ses faibles accents ?
Pour célébrer tant de vaillance,
Sans doute il n’a rendu que des sons impuissants ;
Mais, poète et français, j’aime à vanter la France.
Qu’elle accepte en tribut de périssables fleurs.
Malheureux de ses maux et fier de ses victoires,
Je dépose à ses pieds ma joie ou mes douleurs :
J’ai des chants pour toutes ses gloires,
Des larmes pour tous ses malheurs.