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Ainsi, dans l’âge des amours,
Finit ta chaste destinée,
Et tu péris abandonnée
Par ceux dont tu sauvas les jours.

Tu ne reverras plus tes riantes montagnes,
Le temple, le hameau, les champs de Vaucouleurs,
Et ta chaumière et tes compagnes,
Et ton père expirant sous le poids des douleurs.

Chevaliers, parmi vous qui combattra pour elle ?
N’osez-vous entreprendre une cause si belle ?
Quoi ! Vous restez muets ! Aucun ne sort des rangs !
Aucun pour la sauver ne descend dans la lice !

Puisqu’un forfait si noir les trouve indifférents,
Tonnez, confondez l’injustice,
Cieux, obscurcissez-vous de nuages épais ;
Éteignez sous leurs flots les feux du sacrifice,
Ou guidez au lieu du supplice,
À défaut du tonnerre, un chevalier français.

Après quelques instants d’un horrible silence,
Tout à coup le feu brille, il s’irrite, il s’élance…
Le cœur de la guerrière alors s’est ranimé ;
À travers les vapeurs d’une fumée ardente,
Jeanne, encor menaçante,
Montre aux anglais son bras à demi consumé.
Pourquoi reculer d’épouvante,
Anglais ? Son bras est désarmé.
La flamme l’environne, et sa voix expirante
Murmure encore : ô France ! O mon roi bien-aimé !
Que faisait-il ce roi ? Plongé dans la mollesse,
Tandis que le malheur réclamait son appui,
L’ingrat, il oubliait, aux pieds d’une maîtresse,
La vierge qui mourait pour lui !