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Et j’étais homme alors, et maudissais la terre
Qui le rejeta de ses bords :
Convenez-en, Français, aimer la France alors,
C’était détester l’Angleterre !

Mais voici que Paris armé
Tue et meurt pour sa délivrance,
Vainqueur aussitôt qu’opprimé ;
Trois jours ont passé sur la France :
L’œuvre d’un siècle est consommé.

Des forêts d’Amérique aux cendres de la Grèce,
Du ciel brûlant d’Égypte au ciel froid des Germains,
Les peuples frémissaient d’une sainte allégresse.
Les lauriers s’ouvraient des chemins
Pour tomber à nos pieds des quatre points du monde ;
Sentant que pour tous les humains
Notre victoire était féconde,
Tous les peuples battaient des mains.

Entre l’Anglais et nous les vieux griefs s’effacent :
Des géants de l’Europe enfin les bras s’enlacent ;
Et libres nous disons : « Frères en liberté,
« Dans les champs du progrès guidons l’humanité ! »
Et nous oublions tout, jusqu’à trente ans de guerre ;
Car les Français victorieux
Sont le plus magnanime et le plus oublieux
De tous les peuples de la terre.

Sa cendre, on nous la rend ! mer, avec quel orgueil
De tes flots tu battais d’avance
Ce rivage du Havre, où tu dois à la France
Rapporter son cercueil !
Mais à peine ce bruit fait tressaillir ton onde,
Qu’un vertige de guerre a ressaisi le monde.
Homme étrange, est-il dans son sort