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Pour un qui tombe il en naît mille.

Ouvrez, ouvrez encor les grilles de Saint-Cloud !
Vomissez des soldats pour nous livrer bataille.
Le sabre est dans leurs mains ; dans leurs rangs, la mitraille,
Mais de la Liberté l’arsenal est partout.

Que nous importe, à nous, l’instrument qui nous venge !
Une foule intrépide agite en rugissant
La scie aux dents d’acier, le levier, le croissant ;
Sous sa main citoyenne en arme tout se change :
Des foyers fastueux les marbres détachés,
Les grès avec effort de la terre arrachés,
Sont des boulets pour sa colère ;
Et, soldats comme nous, nos femmes et nos sœurs
Font pleuvoir sur les oppresseurs
Cette mitraille populaire.

Qu’ils aient l’ordre pour eux, le désordre est pour nous !
Désordre intelligent, qui seconde l’audace,
Qui commande, obéit, marque à chacun sa place,
Comme un seul nous fait agir tous,
Et qui prouve à la tyrannie,
En brisant son sceptre abhorré,
Que par la patrie inspiré.
Un peuple, comme un homme, a ses jours de génie.

QubiV toujours sous le feu, si jeune, au premier rang !
Retenons ce martyr que trop d’ardeur enflamme.
Il court, il va mourir… Relevons le mourant :
O Liberté !… c’est une femme !

Quel est-il, ce guerrier suspendu dans les airs ?
De son drapeau qu’il tient encore
Il roule autour de lui le linceul tricolore,
Et disparaît au milieu des éclairs.