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demment les mots de professeurs et de Collège, termes prohibés, qui pouvaient réveiller le conflit avec l’Université ; Maréchal les raya ; mais il obtint des Lettres patentes royales, promulguées à Fontainebleau en septembre 1724, établissant à Saint-Côme cinq places de démonstrateurs royaux, gratifiés de 500 livres d’honoraires, et nommés à sa présentation : le premier enseignerait les principes de la chirurgie, le deuxième l’ostéologie et les maladies des os, le troisième l’anatomie, le quatrième les maladies chirurgicales de la médecine opératoire, le cinquième l’art de la saignée et la petite chirurgie[1]. Les cadavres nécessaires aux leçons seraient fournis par le Châtelet.

À cette nouvelle la Faculté jeta les hauts cris ; d’abord elle prétendait à la possession exclusive des cadavres, qui n’étaient délivrés aux chirurgiens qu’avec permission du doyen. Ensuite la leçon de circonstance imposée aux démonstrateurs après la démonstration était chose antiréglementaire au premier chef, d’autant qu’une de ces chaires, consacrée aux principes de la chirurgie, empiétait sur un domaine monopolisé par la très universitaire Faculté de médecine. La Faculté n’avait-elle donc pas tout fait pour l’instruction des chirurgiens ? Dès 1713, le doyen Hecquet avait voulu créer pour eux, à côté du cours de chirurgie latine, une chaire de chirurgie en langue française, et ce projet, laissé en suspens, avait été exécuté en 1720 ; le 8 janvier 1720, Reneaume de la Garanne, chargé de ce cours, avait prononcé un discours solennel pour l’ouverture des leçons de chirurgie française qui, depuis lors, devaient suffire et suffisaient aux « apprentifs » de Saint-Côme.

Il faut avouer que lesdits apprentifs n’étaient pas d’une exactitude exemplaire : trois ou quatre apprentifs à peine s’aventurèrent en 1726-1727 aux leçons de M. Goutier, docteur régent ; encore le chirurgien Bassuel se donna-t-il le malin plaisir de relever dans les propos de Goutier quelques âneries. Cependant la Faculté ne tolérait qu’avec contrainte une aussi injurieuse abstention. Le 20 avril 1724, les chirurgiens ayant invité la Faculté à envoyer, selon la coutume, le doyen et deux

  1. Les démonstrateurs royaux furent Petit (principes de la chirurgie), Andouillé (ostéologie), Verdier (anatomie), Morand (chirurgie opératoire), Malaval (matière chirurgicale). — (Almanach royal, 1726.)