Page:Delatour - Adam Smith sa vie, ses travaux, ses doctrines.djvu/62

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

nous eût probablement attendus de la part de Caron, feraient, je me l’imagine, assez bonne figure dans cette histoire.

Vous avez, dans un état de santé empirant sans cesse, en proie à un mal épuisant, envisagé, pendant plus de deux ans, l’approche de la mort (ou ce que vous croyez du moins être l’approche de la mort), avec une bonne humeur persistante que peu de gens, même de ceux qui jouissent de la meilleure santé possible, eussent pu conserver pendant quelques heures seulement.

De même, je corrigerai, si vous voulez bien me le permettre, les épreuves de la nouvelle édition de vos Œuvres, et je veillerai à ce que celle-ci soit publiée conformément à vos dernières corrections. Comme je serai à Londres cet hiver, cela me causera très peu de dérangement.

J’ai écrit tout cela dans l’hypothèse que l’issue de votre maladie serait différente de celle que nous avons pu espérer jusqu’ici. Mais votre moral est si bon, votre vitalité si grande et le progrès de votre mal si lent, que j’espère toujours que cela prendra un tour heureux. Le Dr Black lui-même, si froid et si mesuré, semble, dans une lettre que j’ai reçue de lui la semaine dernière, partager le même espoir.

Je pense que je n’ai pas besoin de vous répéter que je suis prêt à me rendre près de vous dès que vous désirerez me voir. À quelque moment que ce soit, je compte que vous ne vous ferez aucun scrupule de me mander.

Je vous prie de me rappeler au meilleur souvenir de votre frère, de votre sœur, de votre neveu et de tous mes autres amis,

Je suis toujours, mon très cher ami,

Votre tout affectionné
Adam Smith.


Trois jours plus tard, le 25 août 1776, David Hume mourait[1]. Smith n’avait pas cru, en réalité, à un dénouement aussi rapide, et la fin de son ami lui causa un vif chagrin. Mais il tint à remplir aussitôt la promesse qu’il avait faite au mourant et à rendre un témoignage public d’estime et d’affection à sa mémoire. Il retraça donc les derniers moments du célèbre historien dans

  1. Par son testament, Hume laissait à son ami une somme de 200 livres sterling et un exemplaire de ses Œuvres ; mais Adam Smith ne voulut pas accepter la première partie du legs, malgré les instances du frère du célèvre historien, M. John Home de Ninewells. — Voir, sur ce point, une lettre du Dr Smith et la réponse de M. John Home, recueillies toutes deux par lord Brougham (Lives of men of science, etc.)