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les nouveaux capitaux se dissiperaient en consommations improductives et l’équilibre se rétablirait de lui-même par l’effet des lois économiques. Si donc il peut y avoir là un danger, comme dans l’usage des meilleurs instruments, il est peu redoutable et il ne doit nullement entrer en considération lorsqu’il s’agit d’engager l’homme à épargner.

Smith a exposé avec ampleur la puissante action de l’épargne sur la reproduction et même sur la répartition des richesses. « La cause immédiate de l’augmentation du capital, dit-il, c’est l’économie et non l’industrie. À la vérité, l’industrie fournit la matière des épargnes que fait l’économie ; mais, quelques gains que fasse l’industrie, sans l’économie qui les épargne et les amasse, le capital ne serait jamais plus grand. L’économie, en augmentant le fonds destiné à l’entretien des salariés productifs, tend à augmenter le nombre de ces salariés dont le travail ajoute à la valeur du sujet auquel il est appliqué ; elle tend donc à augmenter la valeur échangeable du produit annuel de la terre et du travail du pays ; elle met en activité une quantité additionnelle d’industrie qui donne un accroissement de valeur au produit annuel. Ce qui est annuellement épargné est aussi régulièrement consommé que ce qui est annuellement dépensé, et il l’est aussi presque dans le même temps, mais il est consommé par une autre classe de gens. Cette portion de son revenu qu’un homme riche dépense annuellement est le plus souvent consommée par des bouches inutiles et par des domestiques qui ne laissent rien après eux en retour de leur consommation. La portion qu’il épargne annuellement, quand il l’emploie immédiatement en capital pour en tirer du profit, est consommée de même et presque en même temps que l’autre, mais elle l’est par une classe de gens différente, par des ouvriers, des fabricants et artisans qui reproduisent avec profit la valeur de leur consommation annuelle. …Un homme économe, poursuit-il, par ses épargnes annuelles, non seulement fournit de l’entretien à un nombre additionnel de gens productifs pour cette année ou pour la suivante, mais il est comme le fondateur d’un atelier public et il établit en quelque sorte un fonds pour l’entretien à perpétuité d’un même nombre de gens productifs. À la vérité, la destination et l’emploi de ce fonds ne sont pas toujours assurés par une loi