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mais surtout dans la répartition de la richesse. Or, cette appréciation différente de la baisse de l’intérêt, suivant la cause qui lui a donné naissance, a une grande importance au point de vue scientifique, et c’est à Smith que l’on doit en reporter l’honneur.


Cependant, le philosophe écossais a été moins heureux au sujet de la limitation du taux de l’intérêt, et on s’étonne de ne trouver dans son œuvre aucune protestation contre l’intervention des gouvernements à cet égard. Il démontre fort bien comment les lois qui prohibent l’intérêt ne font qu’accroître l’usure au lieu de la prévenir, parce que le prêteur se fait payer, outre l’usage de l’argent, une indemnité très forte pour le risque qu’il court en contrevenant ainsi aux règlements ; mais, en examinant les lois qui, sans prohiber l’intérêt, en règlent le taux maximum, il se borne à rechercher quel doit être ce maximum sans contester aucunement à l’État le droit même de le déterminer. Il aurait dû signaler comment cette pratique est injuste, parce que l’État ne peut pas apprécier arbitrairement la quotité de la prime d’assurance que représente le risque dans chaque cas particulier ; comment elle est impraticable, parce qu’elle provoque, fatalement la fraude ; comment enfin elle est inutile, en ce que, tout en gênant l’industrie, elle n’empêche pas le prodigue de se ruiner et les faiseurs de projets de trouver aussi facilement de l’argent. Il est surprenant que ces considérations aient échappé à la perspicacité d’Adam Smith, et que ce défenseur convaincu de la liberté de l’industrie et du commerce ait accepté, sans les discuter, ces règlements attentatoires à la liberté des conventions, qui avaient pour effet même de précipiter la ruine de ceux qu’ils voulaient protéger.


L’importante question de la rente de la terre n’a pas été non plus fort bien traitée. Adam Smith n’a pas exposé ce sujet délicat avec cette clarté lumineuse qu’il a apportée dans d’autres parties des Recherches, et on a pu lui reprocher non seulement d’avoir contribué beaucoup, par le vague de sa doctrine, aux erreurs de Ricardo, mais encore d’avoir fourni des armes à ceux qui contestent la légitimité même de cette rémunéra-