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sur la rhétorique et les belles-lettres. C’est là, croyons-nous, la véritable raison du plan qu’il adopta et que des biographes trop zélés ont cherché à expliquer par le seul intérêt des élèves.

Comme nous l’avons déjà dit, il ne nous reste rien de l’enseignement du maître sur cette matière, sauf son petit Traité de la formation des langues et quelques études publiées après sa mort sous le titre d’Essais philosophiques. Heureusement Dugald Stewart nous a transmis un court précis de ces leçons, écrit par un des élèves les plus assidus et les plus distingués du jeune professeur : cet élève était M. Millar, qui devait obtenir plus tard, sur la recommandation d’Adam Smith, la chaire de droit à l’Université d’Édimbourg, et qui se fit connaître surtout par son intéressante « Historical view of the English government ».

« Dans le professorat de logique, dit M. Millar, dont Smith fut revêtu à son entrée dans l’Université, il sentit bientôt la nécessité de s’écarter beaucoup du plan suivi par ses prédécesseurs et de diriger l’attention de ses disciples vers des études plus intéressantes et plus utiles que la logique et la métaphysique des écoles. En conséquence, après avoir tracé un tableau général des facultés de l’esprit humain et avoir expliqué de la logique ancienne autant qu’il en fallait pour contenter la curiosité sur la méthode artificielle du raisonnement, qui avait occupé pendant un temps l’attention des savants d’une manière exclusive, il consacra tout le reste du cours à un système de belles-lettres et de rhétorique. La meilleure méthode pour expliquer et analyser avec clarté les diverses facultés de l’esprit humain (partie la plus utile de la métaphysique), se fonde sur un examen attentif des artifices du langage, des moyens divers de communiquer nos pensées par la parole, et, en particulier, des principes par lesquels les compositions littéraires peuvent plaire ou persuader. Les arts qui s’occupent de cette recherche nous accoutument à bien exprimer ce dont nous avons la perception ou le sentiment, à peindre, pour ainsi dire, chaque opération de notre esprit d’une manière si nette qu’on peut clairement en distinguer toutes les parties et en conserver le souvenir. En même temps,