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Rouen

un pupitre, son Histoire des Normands, et qui a laissé des pages extraordinaires dans Les Hôtes de l’Estuaire, croirait, s’il revenait à la vie, que le grand saurien de l’âge calcaire dont il raconte la mort dans ce livre, a déposé des œufs le long de la Seine et que cette progéniture est éclose aujourd’hui.

C’est à travers une véritable forêt de grues de fer que l’on voyage sur les quais de la rive gauche, à Rouen ; et, sur la rive droite, leur envahissement squelettique se reproduit, aussi dense, à partir de l’infortuné Pavillon Flaubert, à Croisset.

À ces monstres gigantesques, enfants modernes de la bête préhistorique, il ne manque que la tête. Ils ont le reste : corps et pattes de crocodiles bizarres. Dressés au-dessus de l’eau, leur interminable foule à claire-voie semble devoir se prolonger jusqu’à la mer. Terriblement, ils travaillent. Et peut-être le bruit de leur labeur incessant s’ajoute-t-il au vacarme qu’on entend le jour et la nuit à Rouen, si l’on habite au bord du fleuve. Un vacarme qui s’explique, en vérité, quand on sait que ce sont des milliards de francs-or qui circulent.