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l’hermine passant

« L’autre soir, j’étais aux écoutes pour savoir s’il y avait du nouveau, car je voyais bien que personne n’était couché. Béatrice ! C’était de moi qu’ils parlaient ! J’ai entendu pour commencer : « mauvais exemple… scandale ébruité… déshonneur… » Et puis : « Il faut la marier le plus vite possible ! »

« Je me suis rapprochée de la porte. Maman :

— « Ce sera déjà beau pour Philippe de Tesnes si on lui donne un petit bout de terre, lui qui n’a rien que la bicoque de sa mère. Il sera trop heureux de l’épouser.

« Ma sœur, toi qui connais comme moi Philippe de Tesnes depuis l’enfance, tu te figures mon tremblement derrière cette porte ! Ce garçon, cette brute aux cheveux rouges, qui sent la même odeur que la chèvre, qui frappe ses chiens, qui fait peur à sa mère depuis que le baron est mort et que personne n’est plus là pour le battre, qui hurle pour un rien (on dit qu’il boit) moi, épouser ça ? Moi qui voudrais cinq enfants, les avoir avec ça ?

« — Laissez-moi faire, a dit Mademoiselle. Je leur parlerai à tous deux en mon