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l’hermine passant

changée en louve reparut dans mon esprit. Pour cacher mon trouble, je lui saisis les mains.

— Je vous remercie de me l’avoir dit la première, Bertrande ! Pour moi c’est un événement très heureux.

— Et pour moi aussi, Marguerite !

Pendant un long silence nos regards ne se lâchèrent plus. Le sien ne bronchait pas. Il ne broncha pas davantage quand, doucereusement, je commençai :

— Je suppose que vous broderez vous-même la layette, habile comme vous l’êtes ?

— Mais certainement !

— Et vous l’ornerez sans doute de notre blason, telle que je vous connais ?

— Pourquoi pas ?

— Et aussi de notre devise, dites, petite hermine ? Ce sera très joli, sous votre aiguille : Ne me salis !

— Très joli, Marguerite !

J’ai laissé passer un petit temps pour achever mon cinglant persiflage. Mais, même au dernier mot, je n’ai pas eu la satisfaction de voir s’altérer ce visage auquel je crachais la vérité.