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Moment nocturne

Nous qui ne portons point le joug bas des aînés,
Qui ne connaissons plus dans quel monde nous sommes,
Nous savons la splendeur des soirs déracinés
Où l’on est seulement des femmes et des hommes.

Nuits d’Afrique ! Tenant nos nuques dans nos mains,
Nous avons respiré l’été comme des plantes,
Alors que, sur nos yeux restés à peine humains,
Le ciel laissait tomber ses étoiles filantes.

Ah ! qui saura les dieux que nous avons été
Quand toute la forêt craquait comme une écorce
Et qu’animale en nous s’étirait notre force
Dans un instant plus grand que notre éternité ?


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