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Comme tout le monde

— Tenez ! Vous êtes un brave homme, vous ! Puisque vous m’avez fait la joyeuseté de me conseiller, voilà vingt sous pour vous !

Parfois, c’était les histoires de la douairière qu’il racontait. Isabelle, alors, dressait l’oreille, avec une rougeur légère qui passait inaperçue.

Il s’agissait de procès de chasse, de vaine pâture, de mitoyenneté, de servitudes. Un cours d’eau passait, comme on dit en termes judiciaires, entre « l’héritage » de la marquise et l’héritage de son voisin. Cela suscitait des contestations infinies. La douairière, d’ailleurs, eût inventé des procès, même sûre de les perdre. Le procès était sa respiration, comme pour d’autres la poésie ou la musique.

Parfois aussi, les deux époux Chardier riaient ensemble de quelque boutade de Zozo, imprévue comme le sont celles des enfants qui, tous, quelque banale personnalité qu’ils doivent avoir plus tard, ont, à l’âge tendre, leurs éclairs d’esprit ou d’originalité.

Zozo, regardant un plat d’andouilles, après avoir longuement réfléchi, demandait :

— Mais, maman ?… Les andouilles, quand c’est vivant, comment qu’ça marche ?

Ou bien, quand le petit lion l’avait effleurée de son bras rose armé de quelque cuiller :