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Comme tout le monde

Le nuage d’or s’était refermé. Isabelle, la respiration coupée, regarda madame Chanduis.

— Il vous a saluée !… bégayait la grosse femme tout empourprée de stupéfaction.

Et l’on eût dit qu’elle allait en mourir d’apoplexie.

Or, ni l’une ni l’autre n’avaient repris leurs sens que la notairesse, dans son émotion, buta contre une pierre et perdit l’équilibre. Isabelle s’était précipitée pour la retenir. Trop tard. La notairesse était par terre.

Quand Isabelle et la petite bonne parvinrent à la remettre debout, il fallut bien convenir que la pauvre avait quelque chose comme une entorse.

Le pied en suspens, la capote de travers, la jupe salie, elle restait à geindre, les yeux au ciel, soutenue par Isabelle et la bonne. Que d’aventures en quelques secondes !

— Il faut croire que c’est dans l’air !… s’écrie Isabelle. Tout le monde va donc s’estropier, maintenant ?

Mais, tout en aidant de son mieux la grosse femme, elle ne peut s’empêcher, malgré l’événement fâcheux, de penser à autre chose. Elle pense au beau cavalier, si noble sur son cheval si bien mis, qui vient de la saluer au passage. Le marquis de Taranne Flossigny, la saluer, elle, Isabelle Chardier ! Pourquoi ?… Mais pourquoi donc ?