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Comme tout le monde

chuchota-t-elle en se retirant. Je sais que vous saurez lui parler… Je vous remercie d’être venue… La pauvre âme ! C’est une rude épreuve que le bon Dieu lui envoie !… Moi, je vais rejoindre le docteur. On a besoin de moi à la salle d’opération…

La porte s’était refermée. Isabelle se trouva seule en présence de l’autre.

Elle la regarda d’abord de loin, sans trouver une parole. Le calme de cette inconnue l’épouvantait.

Et soudain, dans le silence, on entendit venir, des profondeurs de l’hôpital, une espèce de rugissement, le cri du suicidé, le cri du fou qu’on transportait à la salle d’opération.

— Mon mari !… hurle la femme.

Elle s’est ruée sur la porte. Isabelle, d’un bond, lui barre la route. Une courte lutte. Puis, sans savoir comment, les deux femmes se retrouvent assises, tremblantes, effondrées sur la chaise longue du fond. Les rugissements se sont tus. Le silence règne.

Quel vertige dans la tête d’Isabelle ! Comment se trouve-t-elle là, tout à coup, dans cette atmosphère terrifiante, avec ce cœur battant, près de cette personne qu’elle ignorait il y a vingt minutes ?

Toutes deux se tenant aux poignets, luttant encore, se fixent une seconde jusqu’au fond des yeux. Puis leurs doigts, tout à coup, se desserrent.