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Comme tout le monde

dans le bonheur, sont la négation même de toutes les convictions lentement formées dans l’esprit d’Isabelle, à force de douloureuses expériences.

Oui, le mariage peut être une chose heureuse. Rien que de frôler la félicité de ces Godin, Isabelle ne se sent-elle pas toute ragaillardie ? Son deuil même en est adouci. La mort du petit lion se fait moins présente, recule, s’en va rejoindre d’autres nuages noirs, accumulés à l’horizon du passé…

Aujourd’hui, la petite Chardier, de meilleure heure que de coutume, s’en allait vers la maison Godin. Zozo y avait déjeuné. Le portrait devait être terminé cet après-midi même.

La douceur de septembre enveloppait la terre. Isabelle respirait bien. Elle souriait d’avance aux choses agréables qu’elle allait voir, entendre, sentir.

Elle trouva M. Godin seul. Ces dames et le jeune homme étaient allés faire une petite promenade, mais ils reviendraient dans un moment. M. Godin jouerait du piano pour Isabelle, en les attendant.

On fut à l’atelier. Des tubes de couleur, dispersés sur le clavier du piano, avaient éclaboussé quelques touches.

— Ah !… fit M. Godin dans un soupir qui ressemblait à un rugissement.