Page:Delarue-Madrus - Comme tout le monde.djvu/287

Cette page a été validée par deux contributeurs.
275
Comme tout le monde

savais ce qu’elle m’embête, depuis le temps !… Si tu savais ce que j’ai assez d’elle !… Si tu savais ce qu’elle est vieille, et laide, et crampon !… Ah ! la s… !

Et ce sont des épithètes grossières.

— Et dire que c’est encore elle qui me vaut ça ce soir !… Mais tiens !… Je suis enchanté que tu nous aies surpris ! Je vais donc pouvoir la lâcher !… La lâcher !…

Une haine inouïe tord la figure banale. Sans doute, embourgeoisé depuis cinq années dans son adultère du mercredi, plus excédé de sa maîtresse que de sa femme, l’avoué sent-il que ce coup de grâce le délivre enfin d’une longue et morne contrainte. Débridé, vautré dans sa rancœur, il a envie de tout dire, de tout raconter. Il commence :

— Si tu voyais son corps !… Elle est pleine de varices !… Elle…

Isabelle sent confusément passer entre elle et son mari des goujateries inavouables. Alors, sans bien deviner pourquoi, la voici qui, de toute son honnêteté native, se cabre.

— Assez !… crie-t-elle. Je ne veux pas de détails, entends-tu ?… Espèce de…

Des injures suivent. La colère aiguë et misérable des femmes possède enfin madame Chardier tout entière. Sa voix monte toujours plus haut, ses