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Comme tout le monde

maternel. Isabelle le tient aux épaules, le regarde, curieuse, à la mauvaise lueur de la « lampe Pigeon » accrochée au mur du corridor.

— Comme tu as grandi, depuis les dernières vacances !

Vite elle le pousse dans la salle à manger pour mieux le voir à la lumière. Elle examine le jeune garçon sans grâce, presque aussi grand qu’elle, dont les vêtements d’homme ont déjà l’air provincial, triste et fané, dont la grosse lèvre supérieure s’obscurcit d’un duvet noir ; et voici qu’elle se met à rire, tant la ressemblance de ce Léon avec l’autre Léon est frappante.

— Mais pourquoi donc as-tu veillé, petit malheureux !… dit le père qui entre.

— Pour me voir, parbleu !… fait Isabelle presque gaie. N’est-ce pas, mon petit lion ?

À ce mot, le garçon est devenu, tout rouge. On ne peut savoir si c’est parce que l’ancien sobriquet le fâche ou lui fait plaisir.

— N’est-ce pas que c’est pour me voir ?… répète coquettement Isabelle qui n’a pas lâché les épaules carrées de son fils.

— Je ne sais pas… marmonne l’enfant de sa voix qui casse.

Les paupières baissées, il regarde obstinément par terre. Les yeux d’Isabelle scrutent encore un