— Eh bien, reprend à voix basse Modeste Morin, le marquis de Taranne, si madame veut le savoir… ça n’est et ça n’a jamais été qu’un vieux piant.
Isabelle est Normande. Elle a compris la signification de ce mot complexe qui veut dire à la fois un vieux marcheur, un malhonnête homme, un méchant cœur.
— Un vieux piant ?… répète-t-elle, d’une voix blanche… pourquoi ?
Alors la grosse Modeste jette son ouvrage, colle ses paumes sur ses hanches à la Rubens, lance un coup d’œil inquiet autour d’elle ; puis, regardant Isabelle droit dans les yeux, elle parle.
… La couleur du jour commençait enfin d’apparaître sur les vitres de la chambre.
Comme jadis, au temps où l’amour troublait sa conscience de petite femme tentée, Isabelle, les yeux immenses, raidie dans le lit aux côtés de Léon qui ronflait, regardait, depuis des heures, fixement, dans le vide.
Maintenant, elle savait. Ce marquis qu’elle avait aimé, dont elle s’était crue aimée ; ce marquis, charme de sa pauvre vie, apparition magnifique dans la grisaille de son âme ; ce marquis, son