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Comme tout le monde

Mais la réponse hachée du marquis est brutale comme son désir.

— Je te veux… Je te veux !… halète-t-il… Viens !… Viens au pavillon avec moi !… Tout de suite !…

Ses mains errantes cherchent, à travers le manteau hérissé, la gorge palpitante, les hanches rondes de sa petite proie.

Alors Isabelle, sortie de son inertie, le regarde et se stupéfie de voir ce visage pâle aux mâchoires serrées, aux yeux volontaires, aux narines ouvertes, ce visage où domine l’instinct dans ce qu’il a de plus fatal, de plus menaçant.

Isabelle a peur. Elle cherche à se dégager. L’étreinte étroite a maintenant, pour elle, quelque chose d’attentatoire.

— Laissez-moi !… dit-elle.

Et la dignité de son accent force le marquis à reculer.

Pourtant il a repris sa main, qu’il baise frénétiquement à travers le gant, cherchant la peau nue du poignet. Mais il sent bien que la rencontre est déjà terminée.

— Dites ?… répète t-il tout bas, dites que vous viendrez au pavillon ?…

Et comme inspiré :

— Vous ne voyez donc pas que je vous aime ?