nous traînaient à leur suite sur les chemins du monde.
Pourtant, après avoir longtemps hésité, piétiné, tourné, Isabelle Chardier reconnaît enfin, d’après les descriptions du marquis, le calvaire de bois peint, situé tout au bas de la montée boisée qu’il faut prendre pour arriver au petit plateau d’où l’on découvre une vue si belle.
Zozo lève le nez vers le calvaire et dit, très apitoyée :
— Comme il a l’air d’avoir froid ce Jésus, maman !…
Isabelle l’entraîne sans répondre. Zozo réfléchit un peu, tourne la tête tout en se dépêchant, regarde encore le calvaire, puis :
— On pourrait lui mettre ton manteau, maman…
Isabelle n’a pas le temps de rire ni de s’attrister de cet élan d’égoïsme naturel. L’âme de sa fille ne l’intéresse pas en ce moment. Les coups de son cœur, accélérés par la marche et l’émotion, lui font mal. Maintenant, Zozo, pour la suivre, court.
Voici le haut de la montée, voici le petit plateau. Les yeux d’Isabelle regardent sans voir. Elle est à l’une de ces minutes où l’on vit plus rapidement que la vie, où l’improbable devient naturel. Aussi ne s’étonne-t-elle pas un instant de voir le marquis