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HISTOIRE SOMMAIRE DE RIMBAUD

18 décembre 1875[1], d’une synovite, après des souffrances dont le spectacle l’a cruellement affecté. Cette secousse morale, plutôt, je crois, que des études acharnées et diverses, dut contribuer aux violents maux de tête qui lui surviennent à ce moment. Les attribuant à ses cheveux trop touffus, il y applique un remède singulier : se faire raser le crâne,

    courageux ; du moins il satisfit son appétit énorme d’apprendre et acquit des connaissances de théorie musicale. L’histoire du piano, telle que la racontait Rimbaud, est assez amusante. Il alla chez un loueur, lui remit comme adresse une carte de sa mère — naturellement non prévenue. — Quand le piano fut dans l’escalier, une dame sortit et réclama hautement ; elle avait la promesse du propriétaire que jamais dans la maison il n’entrerait un piano. « Et puis enfin, ce piano, pour qui ? » Les porteurs répondirent : « Pour madame Rimbaud ». Entendant parler d’elle, Mme Rimbaud sortit à son tour, et, sans perdre de temps à s’étonner, ne voulant voir que son droit méconnu, signifia à sa voisine, non moins catégoriquement, qu’elle jouerait du piano tant qu’il lui plairait. L’instrument fut installé d’autorité et Rimbaud put s’y évertuer pendant des journées entières.

  1. À dix-sept ans, celle qui lui ressemblait le plus par la fraîche carnation, la chevelure châtain foncé, les yeux bleus : Rimbaud en très belle jeune fille.