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HISTOIRE SOMMAIRE DE RIMBAUD

à Paris, se présente au premier groupe de fédérés. Cet enfant aux yeux de myosotis et de pervenche — qui leur dit : « J’ai fait à pied soixante lieues pour venir à vous… » et qui s’exprime si simplement, si bien — touche les bons communards ; ils font à l’instant même une collecte… dont le produit sert à les régaler ; puis le voici enrôlé dans les « Francs-tireurs de la Révolution », logé à la caserne de Babylone où régnait le plus beau désordre parmi des soldats de toutes armes : garde nationaux, francs-tireurs, lignards, zouaves ou marins ayant fraternisé, le 18 mars, avec les insurgés. Il me parlait plus tard d’un soldat du 88e de marche, « très intelligent », dont il évoquait le souvenir avec une tristesse attendrie, pensant qu’il avait dû être fusillé, lors de la victoire des Versaillais, avec tous les hommes de ce régiment qui furent pris et reconnus. Mais notre « franc-tireur » ne reçoit ni armes ni uniforme, les


    rencontré pour son malheur. Une minute, et le bruit s’évanouit dans les ténèbres ; le poète jugea n’avoir qu’à sourire : des « emballés » aussi, des frères plus enfantins, plus brutaux, voilà tout…