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HISTOIRE SOMMAIRE DE RIMBAUD

village tout voisin — de lui apporter du pain dans la journée. Projet spartiate, qui n’a pas de suite, Mme Rimbaud se résignant à patienter jusqu’à la fin de ce qu’elle considère, apparemment, comme une crise de croissance.[1]

On apprend les événements du 18 mars. Il est de cœur avec la révolution, ses idées le portent là-bas avec eux. Du reste il y trouvera maintenant des moyens d’existence : les trente sous par jour de la garde nationale. Dans le courant d’avril, en six journées de marche[2], il parvient pour la troisième fois

  1. Elle fut, c’est vrai, exceptionnellement rapide ; la taille de Rimbaud, à la fin de 1870, était de 1 m. 61 ou 62, de 1 m. 79 à la fin de 1871.
  2. Traversant en pleine nuit la forêt de Villers-Cotterets, il eut presque une émotion : tout à coup sur la route — où jusqu’à cet instant résonnait seul le bruit de ses pas — formidable et grandissant tapage : ruée de chevaux lancés au triple galop. S’étant blotti dans un de ces abris en pierre qui servent aux cantonniers, Rimbaud comprit, quand devant lui passa l’ouragan et qu’il entendit des mots d’enthousiasme furieux proférés en langue étrangère : c’étaient des cavaliers allemands qui s’amusaient ainsi à faire une charge dans l’obscurité, au risque de se tuer eux-mêmes et sûrement de broyer tout noctambule qu’ils eussent