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LA VIE DE SON ESPRIT

tout et ne craignant rien, puisqu’il souffre. Des moments, il est forcé de s’arrêter quand même… Il faut attendre six mois… un an, peut-être… Oh ! cela c’est le vide affreux, la torture sans nom ! Que les autres s’arrêtent, suspendent avec tranquillité l’action qu’entravent momentanément les circonstances : il ne peut pas s’arrêter, lui ! La pensée va venir. Il n’en veut pas !… La pensée, la vision, les choses d’autrefois, les orgueils qui tentent !… Cela n’existe pas !… Il ne veut pas que cela existe !… Et cela n’aura pas existé, jamais, pas une seule minute, s’il remue des caisses, des outils, des terres, des pierres ; s’il plonge ses mains fiévreuses dans cet amas des productions aux acres parfums d’une industrie barbare ; s’il se jette dans une barque, au milieu des vents et des vagues, pour traverser, retraverser, traverser encore la Mer Rouge ; si un cheval le secoue pendant des jours, des jours, des jours, sur les cailloux, sur les rocs du désert d’Éthiopie ?…

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« Et voici que le corps définitivement s’écroule. Une suite ordinaire des troubles