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LA VIE DE SON ESPRIT

de chaque particulier : un pour tous, tous pour un.

Il n’hésite pas à voir et accepter l’entière conséquence de son principe. Pour parvenir à la liberté par l’égalité, il faudra le nivellement progressif des situations, des fortunes, des rôles, des réputations, des influences, et le bonheur commun aura pour condition que chacun vive dans un état également éloigné de l’abaissement et de la gloire, dans cet état que très franchement, très courageusement il appelle : médiocrité.

La vraie démocratie est-elle réalisable ? L’auteur du Contrat social avoue tristement qu’il en doute. Est-elle conforme à la raison ? L’éducation classique de Rimbaud lui a donné une promptitude de raisonnement déductif qui le porte à voir la seconde question de préférence, et à y répondre : « Oui certes !… » avec une conviction d’autant plus chaude que sa nature morale le porte d’abord vers l’abnégation.

Et pourtant… que c’est impérieux, que c’est angoissant pour la conscience d’un jeune !…