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LA VIE DE SON ESPRIT

définitive. Louis Blanc, d’abord, est un candide, personne n’a étudié la Révolution avec un soin historique et un sens moral plus scrupuleux ; mais il a ceci de particulier qu’il est avant tout l’historien du règne de Louis-Philippe, l’incorruptible juge de la bourgeoisie triomphante, et qu’il aperçoit l’œuvre révolutionnaire à travers la société qui en a profité, qu’il accuse de l’avoir exploitée, faussée, corrompue.

Cette honnêteté vengeresse lui donne la pénétration puissante, la clairvoyance et l’attention fermes. Sous le fracas des paroles et dans la fatalité des événements il discerne l’impulsivité commune que la race avait contractée, qui prenait part au drame, qui devait en détourner les meilleurs effets, ce vice humain qu’il voyait sévir maintenant autour de lui avec une sorte de cynisme inconscient, dont il montrait les progrès dès la fin du Moyen Age, qu’il nommait de son vrai nom : l’individualisme. Il laissait comprendre d’ailleurs, en une dramatique introduction sur la vie intellectuelle au XVIIIe siècle, que le monstre lui fut dénoncé