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LA VIE DE SON ESPRIT

bonne volonté du monde ! Nous ne songeons pas aux circonstances, aux phénomènes qui ont produit le merveilleux savoir-faire, et nous croyons que l’on devient poète comme on apprend à jouer de la mandoline. Or la poésie, habileté verbale, doit être en même temps une très vive ardeur des facultés pensantes ; à cette ardeur, à ce feu, à cet incendie on ne fait point sa part : une fois que c’est bien allumé, il faut que tout flambe.

On a dit à Rimbaud d’apprendre : il a appris, a voulu savoir, et de plus en plus. Son premier succès d’écolier fut un devoir fait en classe de 6e (il avait douze ans) qui contenait un résumé de l’histoire primitive (Égypte, Assyrie, Chaldée, etc.) assez étonnant pour que le professeur[1] l’ait montré avec orgueil à tout le personnel enseignant du collège, en lui annonçant l’apparition dans le monde scolaire d’un « petit prodige ». Voir l’ensemble de la vie des peuples, c’était voir de l’immensité vivante, c’était la conscience individuelle s’éveillant peu à peu en

  1. M. Crouet.