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JOURNAL D’EUGÈNE DELACROIX.

s’obstine à vouloir nous faire passer en remontant sous le pont de pierre. Cela nous vaut un excellent exercice, qui nous met en nage et nous prépare au dîner. Nous arrivons quand il est servi déjà. Nous avons à peine le temps de changer de chemise.

Le soir, en tournant autour du château après dîner, Cadillan[1] me parle de Berryer, de sa manière de travailler, etc.

14 juillet. — Berryer part à six heures du matin pour aller plaider à Paris. Il se flatte de revenir pour dîner ou, au pis aller, à neuf heures du soir. À notre grande surprise, comme nous étions à table, à sept heures et quelque chose, il arrive et achève de dîner avec nous ; j’avais proposé à ces dames de retarder le dîner.

C’est un tour de force étonnant. Arrivé à Paris et au Palais à onze heures et demie, il plaide immédiatement pendant deux heures et demie ; il part, laissant le deuxième avocat chargé de l’affaire écouter la réponse de l’adversaire, et prendre des notes s’il est besoin. Il se rhabille au Palais, repart et arrive sans éprouver d’interruption.

Il était parti avec un morceau de pain et de galantine dans ses poches. Trouvant dans le chemin de fer des gens avec lesquels il est obligé de lier conversation, il ne mange point et ne peut se dédom-

  1. M. de Cadillan, secrétaire de Berryer.