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JOURNAL D’EUGÈNE DELACROIX.

Gautier a fait plusieurs articles sur l’École anglaise : il a commencé par là. Arnoux[1], qui le déteste, m’a dit chez Delamarre[2] que c’était une flatterie de sa part pour le Moniteur, dans lequel il écrit. Je veux bien, pour moi, lui faire l’honneur d’attribuer à son bon goût cette espèce de prédilection marquée tout d’abord pour des étrangers ; cependant ses remarques ne m’ont nullement mis sur la trace même des sentiments que j’exprime ici. C’est par la comparaison avec d’autres tableaux et dans lesquels on croit admirer chez nous des qualités analogues qu’il fallait avoir le courage de faire ressortir le mérite des Anglais ; je ne trouve rien de cela. Il prend un tableau, le décrit à sa manière, fait lui-même un tableau qui est charmant, mais il n’a pas fait un acte de véritable critique ; pourvu qu’il trouve à faire chatoyer, miroiter les expressions macaroniques qu’il trouve avec un plaisir qui vous gagne quelquefois, qu’il cite l’Espagne et la Turquie, l’Alhambra et l’Atmeïdan de Constantinople, il est content, il a atteint son but d’écrivain curieux, et je crois qu’il ne voit pas au delà. Quand il en sera aux Français, il fera pour chacun d’eux ce qu’il fait pour les Anglais. Il n’y aura ni enseignement[3] ni philosophie dans une pareille critique.

  1. Voir t. II, p. 380, en note.
  2. Voir t. II, p. 381, en note.
  3. Nous avons déjà touché dans notre annotation du deuxième volume à cette sévérité de jugement à l’égard de Th. Gautier, et nous nous sommes efforcé d’en préciser les raisons dissimulées. Il nous a paru in-