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JOURNAL D’EUGÈNE DELACROIX.

tains ressorts, rendent singulièrement lourds ceux qui nous font mouvoir et digérer. Je crois certainement au perfectionnement de notre esprit par le fait de l'âge ; je parle d’un bon esprit, sain naturellement et juste surtout. Mais, ô condition cruelle de l’implacable nature ! il n’y a bientôt plus ni corps, ni circulation dans ce corps pour aider cet esprit ; l’homme de bien s’en va quand il commence à bien faire, disait Thémistocle. Bref, vous voilà hors d’affaire avec un renouvellement de santé.

Quel bonheur, comme vous le dites si justement, de revoir autour de soi tout ce qu’on aime et de revenir à cette lumière qui vous montre de si belles choses ! Que trouverons-nous au delà ? La nuit, l’affreuse nuit. Il n’y aura pas mieux ; c’est du moins mon triste pressentiment : ces tristes limbes dans lesquels Achille, qui n'était plus qu’une ombre, se promenait en regrettant, non pas de n'être plus un héros, mais l’esclave d’un paysan pour endurer le froid et la chaleur sous ce soleil dont grâce au ciel nous jouissons encore (quand il ne pleut pas). »


4 décembre. —

« Monsieur, malgré toutes les sympathies que je ne puis manquer d’avoir pour les idées émises dans votre mémoire, je ne puis, en ma qualité de membre du conseil municipal, me joindre à votre protestation. C’est dans le sein du conseil seulement que je puis faire valoir les raisons qui, au nom du goût, militent en faveur de la conservation de la belle