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JOURNAL D’EUGÈNE DELACROIX.

Les usages d’une époque diffèrent entièrement ; la manière d’être expressif, d’être plaisant, de s’exprimer, en un mot, sont en harmonie avec la tournure des esprits. Nous ne voyons les Italiens du quatorzième siècle qu’à travers la Divine Comédie ; ils vivaient comme nous, mais s’égayaient des choses plaisantes de leur temps.

25 octobre. — Le mot de M. Pasquier, en parlant de Solferino : « C’est comme la confiance ; cela se gagne, cela ne se commande pas. »

Hugo disait à Berryer : « Nous sommes tous comme cela. » Il faisait allusion à la crainte de devenir aveugle.

Augerville, 31 octobre. — Montaigne[1] ayant été élu maire de Bordeaux… (Revue britannique.)

  1. Les lacunes du Journal en 1859, si intéressants que soient les passages qui nous restent, sont d’autant plus regrettables que ce fut l’année de sa plus belle exposition, celle aussi où la critique manifesta vis-à-vis du maître le plus impitoyable acharnement. Delacroix avait envoyé au Salon la Montée au Calvaire, le Christ descendu au tombeau, un Saint Sébastien, Ovide en exil chez les Scythes, Herminie et les bergers, Rebecca enlevée par le templier, Hamlet, Les bords du fleuve Sébou. Les vrais artistes qui ont conservé le souvenir de cette exposition se la rappellent comme une des plus imposantes du peintre. Il eût été curieux de retrouver dans les notes intimes de Delacroix la trace des amertumes et des légitimes colères que l’injustice de ses contemporains dut susciter en lui après tant d’années de luttes !