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JOURNAL D’EUGÈNE DELACROIX.

cault, qui imite également, mais plus librement, et met plus d’intérêt.

Préparations. Tout donne à penser que les préparations des anciennes écoles flamandes ont été uniformes. Rubens, en les suivant, car il n’a rien changé à la méthode de ses maîtres sous ce rapport, s’y est constamment conformé. Le fond était clair, et comme ces écoles se sont servies presque exclusivement de panneaux, il était lisse. L’usage des pinceaux a prévalu sur celui des brosses jusqu’aux écoles des derniers temps.

Effet sur l’imagination. (Voir Intérêt.) Byron dit que les poésies de Campbell[1] sentent trop le travail… tout le brillant du premier jet est perdu. Il en est de même des poèmes comme des tableaux, ils ne doivent pas être trop finis. Le grand art est l’effet, n’importe comment on le produit. Voir mes notes du 18 juillet 1850[2].

« Dans la peinture, et surtout dans le portrait, dit Mme Cavé, dans son joli traité, c’est l’esprit qui parle à l’esprit, et non la science qui parle à la science. » Cette observation, plus profonde qu’elle ne l’a peut-être cru elle-même, est le procès fait à la pédanterie de l’exécution. Je me suis dit cent fois que la peinture, matériellement parlant, n'était qu’un pont[3]

  1. Thomas Campbell (1767-1844), poète anglais.
  2. Voir t. II. p. 12.
  3. Sur le caractère suggestif de l'œuvre d’art, dans la pensée de Delacroix, voir notre Étude, p. xxxix et xl.