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JOURNAL D’EUGÈNE DELACROIX.

Je fais une longue promenade de quatre à six heures : Paris me paraît charmant. De la place Louis XV je traverse les Tuileries pour rentrer par la rue de la Paix ; ce beau jardin est tout à fait abandonné : que de souvenirs il me rappelle de ma jeunesse !

Le soir, chez Thiers, il n’y avait que Roger[1]. Je vois le portrait de Delaroche, faible ouvrage, sans caractère et sans exécution. On peut dire des choses fermes, raisonnables, intéressantes même, et l’on n’a pas fait cependant de la littérature ;… en peinture de même. Ce portrait flamand, en pied, d’un homme en noir, qu’il me montre, est admirable et plaira toujours, et cela par l’exécution.

12 décembre. — Dîné chez Mme d’Annibeau : Gisors, Halévy, Perrier, Frémy[2], etc., etc.

Le soir, à l’Opéra-Comique, voir l’Avocat Pathelin[3].

Causé avec Rouland, qui est très bon et très simple[4].

  1. Sans doute le comte Roger du Nord (1802-1881), ancien député sous la monarchie de Juillet, et grand ami de M. Thiers.
  2. Louis Frémy (1807-1891), administrateur et homme politique, ancien conseiller d’État, alors gouverneur du Crédit foncier.
  3. Maître Pathelin, opéra-comique, dont la musique est de François Bazin et les paroles de de Leuven et Ferdinand Lenglé. Les auteurs ont résumé en un acte les principaux épisodes de la vieille Farce de maistre Pathelin. Cette œuvre fut représentée le 12 décembre 1856 à l’Opéra-Comique.
  4. Gustave Rouland (1806-1878), magistrat et homme politique, occupait alors le poste de procureur général près la Cour d’appel de Paris. Il devint, en 1859, ministre de l’instruction publique, puis, en 1864, gouverneur de la Banque de France.