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JOURNAL D’EUGÈNE DELACROIX.

Je sors, je rencontre Séchan[1], peu après Mme Kalergi. Séchan me mène voir ses travaux vraiment surprenants par la dextérité employée à tout envoyer de Paris, tout fait. Je vois Lanton avec lui qui, habitant Baden, est enivré de Baden : tout lui semble charmant ; les femmes s’offrent à qui mieux mieux ; on y déjeune, on y dîne, on y chasse le lendemain.

Benazet m’invite à cette chasse, et je refuse, malgré sa politesse.

Le soir, après dîner, promenade solitaire, où il faut convenir que je m’ennuie un peu malgré Lanton. J’entre à la Conversation, où je vois jouer. Je suis travaillé tout à coup entre la nécessité de faire des excursions sur les invitations de Séchan, affaire de conscience, et le désir de ne pas bouger, plus conforme à ma nature.

Baden, en arrivant, 25 septembre. — J’ai vu hier, à Strasbourg, avec la bonne cousine Lamey, à l'église Saint-Thomas, le tombeau du maréchal de Saxe : c’est le meilleur exemple de l’inconvénient que je signale. L’exécution des figures est merveilleuse, mais elles

  1. Charles Séchan (1802-1874), peintre décorateur, élève de Cicéri, s’est fait une place à part pour le goût qu’il apporta dans l’art décoratif. Le talent qu’il montra en brossant des décors pour les grands théâtres de Paris et de l'étranger le firent distinguer, et en 1849 il fut chargé de restaurer la galerie d’Apollon, au Louvre ; plus tard, on lui confia les peintures architecturales de Saint-Eustache. En 1852, au retour d’un voyage à Constantinople, où il entreprit les décorations intérieures des palais et des kiosques du Sultan, il se rendit à Baden, où il exécuta les travaux décoratifs du Casino. Il a publié un volume de Souvenirs.