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JOURNAL D’EUGÈNE DELACROIX.

Je suis parti très tard avec Auber et Alard. Reconduit ce dernier jusqu’au Palais-Bourbon par le plus beau clair de lune : il m’a raconté des proverbes de sa façon : L’homme qui raconte la prise de la Bastille, etc.

Mercredi 4 février. — Chez Boilay, en sortant de chez le ministre. Revu là avec plaisir la fille d’Hippolyte Lecomte[1]. Mocquart[2] y est venu ; il a raconté avec emphase des particularités sur Géricault. Parlant de la présence de Mustapha[3] à l’enterrement, il a fait une description pittoresque de la douleur de ce pauvre Arabe, qui s’était, disait-il, prosterné la face contre terre sur la tombe. Le fait est qu’il n’en fut rien et qu’il resta à distance, non sans produire un effet touchant sur l’assistance. Mocquart prétend qu’A… n’y vint pas, et lui en fait un sujet grave de blâme. Il me semble que mes souvenirs le justifient,

    ministre de l’intérieur ; il ne fut nommé qu’en 1854 président du Corps législatif.
    Delangle venait d’être nommé procureur général à la Cour de cassation, en remplacement de Dupin.
    Romieu, homme de lettres et administrateur. Il était alors directeur général des beaux-arts.
    Jules-Henri Vernoy de Saint-Georges (1801-1875), auteur dramatique, un des plus féconds librettistes de cette époque.
    Boilay, publiciste et administrateur ; c’était un protégé de M. Thiers ; il fut rédacteur au Constitutionnel.

  1. Hippolyte Lecomte, peintre, né en 1781, mort en 1855. Il devint le beau-frère d’Horace Vernet et, grâce à lui, fut chargé de nombreuses commandes.
  2. Mocquart, homme politique et littérateur. Il était alors secrétaire intime et chef du cabinet de l’Empereur.
  3. Mustapha était un des modèles favoris de Géricault.