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JOURNAL D’EUGÈNE DELACROIX.

nal. C’est dans une semblable situation qu’il est difficile de résister à la conquête. Il se trouve toujours quelque peuple affamé à son tour de jouissances, ou tout à fait barbare, ou ayant encore conservé quelque valeur et quelque esprit d’entreprise, pour profiter des dépouilles des peuples dégénérés. Cette catastrophe, facilement prévue, devient quelquefois une sorte de rajeunissement pour le peuple conquis. C’est un orage qui purifie l’air, après l’avoir troublé ; de nouveaux germes semblent apportés par cet ouragan dans ce sol épuisé ; une nouvelle civilisation va peut-être en sortir, mais il faudra des siècles pour y voir refleurir les arts paisibles destinés à adoucir les mœurs et à les corrompre de nouveau, pour amener ces éternelles alternatives de grandeur et de misère dans lesquelles n’apparaît pas moins la faiblesse de l’homme, aussi bien que la singulière puissance de son génie.

22 septembre. — Dessiné quelques bateaux qui rentraient et été à la jetée, où la mer était très belle, et où j’ai vu entrer et sortir nombre de barques, un joli yacht anglais, une goélette, etc.

Revenu tard et dormi après déjeuner. Petite aquarelle avant dîner d’un brick anglais et de barques envasées devant le Pollet, en face de mes fenêtres. Après dîner, promené sur la jetée par la mer basse. J’y étais presque toujours seul.

Chez Manceau ensuite. Commérages insipides ;