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JOURNAL D’EUGÈNE DELACROIX.

vrai, que les hommes de talent, chez les modernes, et il parle depuis Jésus-Christ, doivent être plats comme les Delaroche[1], ou biscornus et incomplets. Michel-Ange n’a eu qu’un moment, il s’est répété ensuite ; peu d’idées, par conséquent, mais une force que sans doute personne n’a égalée. Il a créé des types : son Père éternel, ses Diables, son Moïse, et cependant il ne peut faire une tête, même il les abandonne ; c’est par là que pèchent les modernes : Puget et mille autres. Chez les anciens, au contraire, que de types : ce Jupiter, ce Bacchus, cet Hercule, etc. !

Revenu, par une chaleur affreuse, sur le quai, et réellement très abattu et fatigué de ce second excès, après celui du matin. J’étais surmené.

Ce qui caractérise le maître, suivant lui, à propos de Meissonier, c’est, dans le tableau, la vue de ce qui est essentiel, auquel il faut arriver absolument. Le simple talent ne pense qu’aux détails : Ingres, David, etc.

7 septembre. — Sorti de bonne heure avec Jenny, qui va se baigner. Ne trouvant pas d’intérêt à la mer,

    n’a pas dû changer depuis les âges les plus reculés ; Jésus-Christ, après tant d’autres, a vu tout cela ; aussi vais-je le peindre endormi dans sa barque pendant la tempête. » Ce propos, que nous tenons de M. Chenavard lui-même, montre l’idée qui a inspiré à Delacroix ce sujet qu’il a repris maintes fois avec de nombreuses variantes.

  1. Dans un autre passage du Journal, Delacroix compare la peinture de Delaroche à celle d’un « amateur qui n’a aucune exécution comme peintre ».