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JOURNAL D’EUGÈNE DELACROIX.

encore. Travaillé au coin de droite, le cheval, l’homme et la lionne sautant sur la croupe.

3 août. — Le matin, rendez-vous chez l’abbé Coquant pour lui demander de me laisser travailler le dimanche (à Saint-Sulpice). Impossibilité sur impossibilité. L’Empereur, l’Impératrice, Monseigneur conspirent pour qu’un pauvre peintre comme moi ne commette pas le sacrilège de donner cours, le dimanche comme les autres jours, à des idées qu’il tire du cerveau pour glorifier le Seigneur. J’aimais beaucoup au contraire à travailler de préférence le dimanche dans les églises : la musique des offices m’exaltait beaucoup[1]. J’ai beaucoup fait ainsi à Saint-Denis du Saint-Sacrement.

4 août. — En sortant du conseil, à l’Instruction publique pour M. Ferret ; déjeuné sur la place de l’Hôtel de ville ; lu dans l’Indépendance belge un article sur une traduction de l’Enfer, d’un M. Ratisbonne[2]. C’est la première fois qu’un moderne ose dire son avis sur cet illustre barbare. Il dit que ce poème n’est pas un poème, qu’il n’est point ce qu’Aristote appelle

  1. Delacroix rencontra, paraît-il, la plus grande difficulté à obtenir la permission de travailler le dimanche dans la chapelle des Saints-Anges. Ce ne fut qu’après de nombreuses démarches qu’il y fut autorisé.
  2. M. Louis Ratisbonne, qui fut le secrétaire et l’ami d’Alfred de Vigny, était attaché à la rédaction du Journal des Débats. En 1852. il avait entrepris de traduire en vers la Divine Comédie de Dante. La première partie, l’Enfer, obtint en 1854 un prix Montyon à l’Académie française.