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JOURNAL D’EUGÈNE DELACROIX.

16 juin. — Donné à Haro (pour parqueter) le carton de la Petite Andromède[1]. — Au conseil, où j’avais manqué plusieurs des dernières séances. Ottin[2], que je trouve en revenant, me conte que Simart[3] ayant fait une figure de David, Ingres, qu’il avait fait venir dans son atelier, la lui fait jeter à bas, à cause de son sujet. On ne peut se permettre qu’un sujet grec : faire un David était une monstruosité. Que dirait-il du pauvre Préault, qui fait des Ophélias et autres excentricités anglaises et romantiques ?

Dîné chez Mme de Forget, avec le petit d’Ideville. Joué au billard avec lui.

— Sur la fragilité de la peinture, particulièrement chez les modernes.

17 juin. — Dîné chez Chabrier avec Poinsot, l’amiral Casy[4], d’Audiffret[5], Beauchesne[6], etc. Poinsot

  1. Voir le Catalogue Robaut, nos 1001 et 1002.
  2. Ottin, sculpteur, né en 1811, élève de David d’Angers, obtint le prix de sculpture dans le concours de 1836. Il est l’auteur d’un grand nombre d’œuvres appréciées.
  3. Simart, sculpteur (1806-1857), élève de Dupaty et de Pradier. Grand prix de Rome, il partit pour l’Italie. Ingres, alors directeur de l’école, lui fît le plus sympathique accueil et lui prodigua ses conseils. C’est sans doute à Rome, à la villa Médicis, que se passa la scène que raconte ici Ottin.
  4. L’amiral Casy (1787-1862). Engagé comme mousse, il gagna successivement tous ses grades dans la marine, devint en 1848 représentant à la Constituante, occupa un moment le ministère de la marine, puis, en 1853, fut nommé sénateur.
  5. Charles-Louis d’Audiffret, économiste et homme politique, né à Paris en 1787. Il rendit de grands services dans l’administration des finances, fut président de la Cour des comptes, pair de France, puis sénateur en 1852.
  6. Alcide-Hyacinthe du Bois de Beauchesne (1804-1873), littérateur,