Page:Delacroix - Journal, t. 2, éd. Flat et Piot, 2e éd.djvu/330

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
314
JOURNAL D’EUGÈNE DELACROIX.

Dîné chez Mme de Forget avec Laity[1] et Mme de Querelles, très bonne enfant.

Chez Devinck. Musique : morceau de Bach arrangé par Gounod. Le violon Hermann trop maniéré[2].

21 mars. — Travaillé toute la journée à l’Antée[3] pour Dumas, aux compositions de Chasses de lions[4], etc.

Vers quatre heures, chez le ministre ; revenu à pied ; rencontré l’insupportable Dagnan[5] et le bon Debay qui espère toujours que je traverserai la forêt de Sénart pour aller le voir à Montgeron.

Le soir, M. Lefèvre-Deumier[6] ; j’y ai vu Yvon[7], qui m’a complimenté.

  1. Laity, ancien lieutenant d’artillerie, qui avait pris parti avec sa troupe pour le prince Louis-Napoléon lors de l’échauffourée de Strasbourg, où il se trouvait alors en garnison. Traduit devant la cour d’assises et acquitté, il donna sa démission. À l’avènement de Louis-Napoléon à la présidence de la République, il reprit du service dans l’armée, mais il donna de nouveau sa démission après le coup d’État. En 1854, il fut nomme préfet, et devint sénateur en 1857.
  2. Adolphe Hermant, dit Hermann, né à Douai en 1822, élève du Conservatoire de Paris, violoniste distingué.
  3. Hercule étouffant Antée. (Voir Catalogue Robaut, no 1139.)
  4. Voir Catalogue Robaut, nos 1230, 1242, 1278, 1349, 1350.
  5. Isidore Dagnan, paysagiste, qui exposa de 1819 à 1868.
  6. Lefèvre-Deumier (1797-1857), littérateur et poète, auteur de tragédies romantiques écrites sous l’influence de Byron. En 1830, il prit part à l’insurrection de Pologne, puis, de retour en France, se maria et recueillit par héritage une immense fortune. Il devint, en 1852, bibliothécaire des Tuileries.
    Sa femme, née Roulleaux-Dugage, s’est adonnée à la sculpture ; elle exposait cette même année 1853 un buste de Mgr Sibour qui lui valut une médaille.
  7. Adolphe Yvon, peintre, élève de Delaroche, qui n’avait jusqu’alors exposé que des portraits et des scènes bibliques ou de genre. Il n’aborda le genre historique et militaire qu’au Salon de 1853, en peignant l’épisode du Premier consul descendant le mont Saint-Bernard, pour le château de Compiègne.