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JOURNAL D’EUGÈNE DELACROIX.

le ton même de l’objet ne se trouve qu’immédiatement à côté du luisant ; de même dans la robe des chevaux.

En présence de cette jolie pièce, de ces passages si fins, de cette musique que je sais par cœur, je voyais l’indifférence sur presque toutes ces figures de gens ennuyés, qui ne viennent là que par ton, ou seulement pour entendre l’Alboni. Le reste est un accessoire, et ils n’y assistent qu’en bâillant. Je jouissais de tout… Je me disais : « C’est pour moi qu’on joue ce soir, je suis seul ici ; un enchanteur a eu la complaisance de placer près de moi jusqu’à des fantômes de spectateurs, pour que l’idée de mon isolement ne nuise pas à mon plaisir ; c’est pour moi qu’on a peint ces décorations et taillé ces habits, et, quant à la musique, je suis seul à l’entendre. »

La réforme du costume s’est étendue jusqu’à supprimer tout ce qui est caricature ingénieuse, inhérente au fond même du sujet. Le costumier se croit exact en donnant à Dandini un costume très ponctuel de grand seigneur du temps de Louis XV ; le prince de même ; vous vous croyez à une pièce de Marivaux. Avec Cendrillon, nous sommes dans le pays des fées. Alidor a un costume noir, d’avoué.

Samedi 19 novembre. — J’ai vu ce matin Fleury[1] et Halévy, puis Gisors,

  1. Robert-Fleury.