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JOURNAL D’EUGÈNE DELACROIX.

Le Calvaire et le Saint Liévin sont le comble de la maestria de Rubens.

L’Adoration des mages, que je trouve supérieure à celle d’Anvers, a de la sécheresse quand on la compare à ces deux autres ; on n’y voit point de sacrifices ; c’est au contraire l’art des négligences à propos, qui élève si haut les deux favoris dont j’ai parlé. Les pieds et la main du Christ à peine indiqués.

Il faut y joindre le Christ vengeur. La furie du pinceau et la verve ne peuvent aller plus loin.

L’Assomption[1] un peu sèche : la Gloire me paraît manquée ; je ne puis croire qu’il n’y aiteu des accidents.

Il y a une belle Vierge couronnée, à droite en entrant. Vigueur d’effet, point autant de laisser aller que dans les beaux. Les nuages sont poussés jusqu’au noir. Ce diable d’homme ne se refuse rien. Le parti pris de faire briller la chair avant tout le force à des exagérations de vigueur.

— Chez le duc d’Arenberg, vers deux heures. Beau Rembrandt.

Tobie guéri par son fils. Esquisse de Rubens très grossièrement dessinée au pinceau, quelques figures ayant de la couleur, allégorie dans le genre de celle du Musée.

  1. « Rien des années, écrit Fromentin, séparent l’Assomption de la Vierge des deux toiles dramatiques de Saint Liévin et du Christ montant au Calvaire. » Il parle de « la main puissante, effrénée ou raffinée qui peignait à la même heure le Martyre de saint Liévin, les Mages du Musée d’Anvers, ou le Saint Georges de l’église Saint-Jacques ». (Fromentin, les Maîtres d’autrefois, p. 40, 41.)