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JOURNAL D’EUGÈNE DELACROIX.

jamais rencontrer le Beau à personne. Tout le monde a dû se demander ce que venait alors faire là le professeur. Après avoir parlé de l’opinion de Voltaire sur les arts, il cite à son tribunal le pauvre baron de S…, qui lui en eût répondu de bonnes, s’il avait pu lui répondre. Ce pauvre baron, selon lui, ne voit l’avènement du Beau moderne que quand le gouvernement des deux Chambres aura fait le tour de l’Europe, et que la garde nationale sera installée chez tous les peuples. Ç’a été la plaisanterie capitale de la séance, et qui a excité cette explosion de gaieté de sacristie particulière aux gens d’Église, dont on voyait çà et là les robes noires dans cet auditoire fort mélangé.

Je m’en suis allé peut-être un peu scandaleusement après cette première partie, dont je ne donne qu’un pâle résumé. J’y ai été encouragé par l’exemple de quelques personnes qui se sont trouvées, ainsi que moi, suffisamment édifiées sur le Beau.

De là, j’ai été à pied trouver Rivet, par un temps magnifique, et avec une grande jouissance de remuer les jambes en liberté, après ma captivité de tout à l’heure.

Vendredi 6 mai. — J’étais invité par le ministre d’État à assister ce soir à une représentation du Conservatoire donnée par des élèves.

Dîné chez Mme de Forget avec le jeune X…, et promené le soir : j’ai renoncé à la partie. J’avais