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JOURNAL D’EUGÈNE DELACROIX.

relles qui font de lui un animal. A mesure qu’il s’éloigne de l’état le plus semblable à l’animal, c’est-à-dire de l’état sauvage à ses différents degrés, il perfectionne les moyens de donner l’aliment à cette faculté idéale refusée à la bête ; mais les appétits de son cerveau semblent croître à mesure qu’il cherche à les satisfaire ; quand il n’imagine ni ne compose pour son propre compte, il faut qu’il jouisse des imaginations des autres hommes comme lui, ou qu’il étudie les secrets de cette nature qui l’entoure et qui lui offre ses problèmes. Celui même que son esprit moins cultivé ou plus obtus rend impropre à jouir des plaisirs délicats où cet esprit a part, se livre, pour remplir ses moments, à des délassements matériels, mais qui sont autre chose que l’instinct qui pousse l’animal à la chasse. Si l’homme chasse dans un état moyen de civilisation, c’est pour occuper son temps. Il y a beaucoup d’hommes qui dorment pour éviter l’ennui d’une oisiveté qui leur pèse et qu’ils ne peuvent néanmoins secouer par des occupations offrant quelque attrait. Le sauvage, qui chasse ou qui pêche pour avoir à manger, dort pendant les moments qu’il n’emploie pas à fabriquer, à sa manière, ses grossiers outils, son arc, ses flèches, ses filets, ses hameçons en os de poisson, sa hache de caillou.

Jeudi 8 avril, — Coulé sur l’Hercule attachant Nérée : vermillon et laque ; jaune de zinc clair et terre de Cassel.