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XXVI
EUGÈNE DELACROIX.

ter, l’amènent à examiner les conditions élémentaires de la vie heureuse. Partant de cette idée que l’homme ne place presque jamais son bonheur dans les biens réels, Delacroix en revient aux principes de sagesse de la philosophie antique, renouvelés par les sages des temps modernes, c’est-à-dire à l’acceptation des conditions de vie telles qu’elles nous sont imposées : d’une part, développement de notre être en conformité avec ses tendances, ce qui n’est autre chose que la doctrine de Gœthe ; de l’autre, résignation aux nécessités inéluctables qui établissent les lois de la vie comme celles de la mort, « condition indispensable de la vie ». Il reconnaissait d’ailleurs qu’une telle philosophie ne pouvait être à la portée du grand nombre, et pensait que le monde continuerait à se mouvoir dans le même cercle, impuissant qu’il demeurera toujours à se transformer dans son essence…

Esprit généralisateur, Delacroix fut également « universel », et par là nous n’entendons pas seulement qu’il fut universel comme peintre ; nous voulons marquer que sa curiosité et sa compréhension d’artiste s’étendirent à toutes les manifestations de la beauté. Sa curiosité d’abord, car aucune de ces manifestations ne lui demeura indifférente : il s’intéressa à toutes ; son intelligence, perpétuellement en éveil, ne manqua jamais une occasion de se développer, d’agrandir le champ de ses connaissances. Sa compréhension enfin le rendit apte, sinon à les juger toutes « absolument et définitivement », du moins, malgré les erreurs de détail qui peuvent entacher quelques-unes de ses appréciations, à en pénétrer l’esprit caché et l’intime signification. Montrer quel retentissement salutaire une pareille universalité peut exercer sur une âme