sa cousine était un être sacré, un ange, une personne divine ! mais il se contint ; le respect profond, la vénération tendre qu’il avait pour sa cousine, se représentèrent si vivement à son esprit, qu’il trouva la force de réprimer son indignation. Il en vint même jusqu’à sentir la nécessité d’user de quelque dissimulation envers celui qui venait de le blesser si profondément.
— Je vous remercie mille et mille fois, dit-il, de la franchise avec laquelle vous prévenez tous les cas qui pourraient mettre obstacle à ma carrière dans le monde ; mais je vous jure, monsieur, ajouta Ernest avec fierté, que je n’ai pas d’amourettes.
— Eh bien ! tant mieux, répliqua froidement M. de Thiézac ; car rien alors ne pourra vous retenir ici ou à Clermont, au delà du temps nécessaire pour vous préparer à partir.
Ernest allait faire quelque objection, lorsque M. de Thiézac ajouta en tirant sa montre :
— Mais nous ne nous apercevons pas, en causant ainsi, de la promptitude avec laquelle le temps s’écoule ; une heure est sonnée, il faut nous reposer. Nous nous reverrons demain.
Ernest tint encore bon, et chercha à reprendre la parole ; mais son hôte lui présenta la main, lui souhaita le bonsoir et coupa court ainsi à cet entretien.
Notre jeune homme rentra chez lui, étouffant de colère et de jalousie. Longtemps mille idées incohérentes l’assaillirent pendant une pénible insomnie. Bref, il fatigua tellement son esprit et son corps, que vers les quatre heures du matin tous ses membres restèrent accablés sous un sommeil de plomb.
Quant à son voisin, il s’était mis prudemment au lit pour réparer la fatigue du voyage et ordonner les nombreuses réflexions que la conversation précédente lui avait suggérées. Il dormit peu, mais bien ; et après quelques heures de repos, il reprit le cours de ses pensées que le sommeil avait mûries, et médita alors sur le plan de la journée qu’il avait à passer.
Le grand avantage, le seul peut-être, des rivaux de l’âge de M. Thiézac sur les jeunes gens comme Ernest, est de ne